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Le mythe du dirigeant multitâche ou comment survivre à l’illusion du contrôle (1/2)

Le mythe du dirigeant multitâche ou comment survivre à l’illusion du contrôle (1/2)

Le mythe du dirigeant multitâche ou comment survivre à l’illusion du contrôle (1/2)

Bastien Gibert

 

Il est 8h. Les réunions de la veille n’ont pas encore livré toutes leurs conséquences que les premières urgences de la journée bousculent déjà votre agenda : Un appel client qui s’éternise, un salarié à recadrer, un tableau de bord à finaliser et un prestataire à relancer. Sans oublier ce dossier stratégique que vous avez promis de traiter personnellement. 

 

Bienvenue dans le quotidien du « dirigeant multitâche », que beaucoup connaissent, figure aussi vaillante qu’épuisée d’un modèle d’organisation que la réalité vient chaque jour un peu plus éroder.

 

Une réalité bien connue, un système de plus en plus fragile

 

Soyons clairs : endosser plusieurs rôles à la fois n’est pas une faute de gestion. C’est souvent une nécessité, notamment dans les PME, les structures agiles ou les environnements en tension. La maîtrise, la réactivité et l’engagement du dirigeant font partie de l’ADN de nombreuses entreprises.

 

Mais il existe un point de bascule, un seuil critique au-delà duquel ce fonctionnement n’est plus synonyme de performance, mais de risques. Des risque d’erreurs, des retards, des oublis, le désengagement des équipes, et des conséquences importantes en termes de satisfaction clients et de performance économique. Des risques d’usure aussi, avec une charge mentale qui devient trop lourde et sclérosante. La surcharge chronique devient structurelle et le pilotage stratégique s’efface derrière l’opérationnel de court terme qui dicte votre emploi du temps et ceux de vos collaborateurs. Et ce qui était un atout hier, devient un angle mort aujourd’hui.

 

Depuis 20 ans, j’accompagne de nombreux dirigeants qui ressentent ce tiraillement et cet épuisement : Comment préserver la performance de l’entreprise sans s’y perdre soi-même ? Comment retrouver un mode de fonctionnement qui redonne de la lisibilité, de l’impact, du temps utile, de la sérénité ? Est-il possible de manager différemment ?

 

La bonne nouvelle : des réponses existent. Pragmatiques. Efficaces et immédiatement activables.

 

10 minutes pour comprendre et agir

 

Il n’existe pas de méthode miracle ou de modèle hors-sol qui permette de corriger par magie une situation d’hyper-tension professionnelle. Comme tout changement, la prise de conscience et le déploiement de mesures simples et routinières, constituent les premiers pas et actions à engager. Lorsque je débute une mission d’accompagnement auprès d’un dirigeant ou d’un service en situation de pression, je m’intéresse toujours à son emploi du temps et à son mode de gestion, avec une question des plus simples : pouvez-vous me dire ce que vous avez fait la semaine dernière et le temps que vous y avez passé ?

Rares sont les dirigeants et les managers à réussir à mettre en perspective plus de 70% de leur emploi du temps.

Cela signifie-t-il qu’ils ont travaillé seulement 3,5 jours la semaine passée ? Bien au contraire, ils ont souvent été submergé et cette question démontre qu’une partie importante de leur emploi du temps ne s’explique pas clairement, car elle a été allouée à de nombreuses tâches non prévues, souvent non stratégiques et prioritaires. 

Il est donc essentiel d’apprendre à (re) maîtriser son emploi du temps, pour réussir à mieux employer son temps.

 

Par où commencer ? par la base, tout simplement, avec trois leviers et outils qui vont vous permettre de sécuriser vos emplois du temps.

 

1. Privilégier l’essentiel

 

Lorsque le temps manque et que les tâches sont trop nombreuses, il est indispensable de prioriser. Toutes les tâches ne se valent pas et toutes les tâches n’ont pas, nécessairement, besoin de vous.

 

Premier pas : clarifier votre champ d’action réel, et celui de vos collaborateurs. Trop souvent, le temps du dirigeant est accaparé par des tâches qui ne devraient pas être de son ressort. Par habitude, par perfectionnisme, par manque de confiance… ou par défaut d’organisation.

 

Pour vous aider dans la définition des tâches prioritaires à engager sur le court terme, vous pouvez utiliser la matrice d’Eisenhower, qui répartit les tâches selon une double clé « degré d’urgence (faible/fort) » et « importance (faible/forte) ». Il en ressort quatre espaces, correspondant à quatre comportements à adopter :

  • Les tâches urgentes et importantes sont à exécuter.

  • Les tâches urgentes et non importantes sont à déléguer (avec supervision).

  • Les tâches importantes et non urgentes sont à replanifier.

  • Les tâches non importantes et non urgentes sont à reporter.

La matrice d’Eisenhower est simple à utiliser, et elle constitue un outils précieux d’aide à la décision pour prioriser et visualiser vos tâches et leur gestion.

 

Si cette matrice est utile, je la trouve parfois imprécise car elle ne valorise pas une dimension clé : le temps. Je préfère donc utiliser une matrice légèrement modifiée dans les clés d’évaluation de vos tâches : les tâches stratégiques (peu stratégiques et très stratégiques) et les tâches chronophages (peu chronophages et très chronophages). Il en ressort également quatre espaces avec les quatre mêmes comportements à adopter : 

  • Les tâches stratégiques et non chronophages sont à exécuter.

  • Les tâches stratégiques et chronophages sont à déléguer (partiellement ou non avec supervision).

  • Les tâches non stratégiques et non chronophages sont à replanifier.

  • Les tâches non stratégiques et chronophages sont à reporter.

 

Prendre l’habitude, chaque semaine, de mettre en perspective la gestion de votre temps de la semaine passée, de réfléchir posément à celle de la semaine prochaine, doit constituer une routine qui, en 15 minutes, va peu à peu repositionner le respect de vos priorités et surtout, l’arbitrage quotidien, au cœur de vos décisions et de votre management. 

Ce conseil, fondamental pour les dirigeants, l’est tout autant pour tous les collaborateurs d’une entreprise.

 

2. Être organisé

 

La dispersion est l’ennemie du dirigeant. C’est pourquoi la deuxième étape consiste, sur la base des actions qui ressortent des matrices ci-avant présentées, à formaliser les tâches que vous avez à réaliser et à superviser. 

Votre objectif :  jalonner, planifier, ritualiser votre temps.

 

Comment commencer ? par la méthode de la semaine en 5 règles qui constitue un idéal vers lequel il convient de tendre, dès lors que vous en avez le choix et l’occasion.

 

Règle n°1 : Instaurer une réunion hebdomadaire rapide (15 minutes) de calage (non technique) pour anticiper les urgences, communiquer sur les agendas et les échéances de la semaine.

Règle n°2 : Planifier les tâches stratégiques en début de journée (disponibilité mentale optimisée).

Règle n°3 : Offrir une visibilité claire des agendas, avec des règles partagées sur les plages de disponibilité et de non-interruption..

Règle n°4 : Regrouper le traitement des mails en 3 séquences par jour (matin, midi, soir).

Règle n°5 : Limiter la durée des réunions à 1h.

 

 

3. Être opérationnel

 

Le troisième levier, souvent négligé, et peut-être le plus important, concerne la « to-do liste », c’est-à-dire la liste des actions prioritaires à engager. Ce document physique, doit être en permanence sur votre bureau. 

Il est construit à partir des matrices de priorisation des tâches (pour commencer, vous pourrez vous en passer avec le temps), et il vous permet de visualiser toutes les tâches que vous devez faire et superviser sur la semaine. 

Au fur et à mesure de l’avancée de la semaine, vous engagez des tâches (à surligner) et vous finalisez des tâches (à rayer). En fin de semaine, idéalement, toutes les tâches ont été surlignées et rayées. Il s’agit d’un outils fondamental pour vous assurer que les tâches que vous avez considérées comme essentielles le reste dans la semaine, et surtout, pour optimiser votre capacité à vous projeter, et à faire, et faire faire à vos collaborateurs, ce que vous aviez prévu dans les délais impartis.

Là encore, la « to-do liste » se rédige en moins de 30 minutes, sur une page recto. Elle constitue un outil puissant de maîtrise de vos journée, et tous vos collaborateurs tireraient également des bénéfices à l’utiliser.

 

 

 

Diriger avec lucidité, pas avec surchauffe

 

Le rôle du dirigeant n’est pas de tout faire. Il est de faire avancer l’entreprise, en embarquant ses équipes, en gardant une vision claire, en prenant les bonnes décisions au bon moment. Cela suppose de prendre de la hauteur, d’apprendre à prioriser, de savoir dire non, afin de retrouver du temps de qualité, de sortir de l’immédiateté permanente, de s’autoriser à déléguer et à cadrer. 

Pour commencer à (re) maîtriser votre temps, familiarisez-vous avec ces trois outils et méthodes, utilisez les chaque jour afin qu’ils deviennent une habitude.

Je vous présenterai dans un prochain article, quatre autres leviers à valoriser pour vous aider à reprendre le contrôle, à gagner en efficacité et en sérénité : gérer les sollicitations, optimiser les réunions, améliorer et harmoniser les process internes, éviter la sur-qualité et les tâches inutiles.

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